Lotissement de Nouakchott : les injustices continuent

22 January, 2015 - 00:32

Au moins quatre années se sont écoulées sans que ni les services du ministère de l’Habitat ni ceux de la très omnipotente Agence du Développement Urbain (ADU) ne réussissent à boucler cette histoire d’attributions foncières censées mettre fin, disait-on, aux kebbas et autres gazras disséminés dans tout Nouakchott. Chaque jour apporte son lot de mésaventures et d’injustices dont sont souvent victimes les PFSGD (Personnes Faibles Sans Grande Défense). Des souffrances quotidiennes. Des indélicatesses à n’en plus finir. Des réseaux qui opèrent au grand jour. Des sectes, même, animées par d’anciens administrateurs et d’anciens puissants officiers, reconvertis en samsaras incontournables dans l’obtention des bonnes parcelles, communément appelés « d’avenir » dans tous les coins de Nouakchott. Rien n’échappe à la mascarade : les coins, les sommets, les hauteurs. Tout passe. La recrudescence de la légalisation des espaces publics est venue s’ajouter aux dégâts liés à la terre. Des hommes, des femmes et des groupes se sont immensément enrichis, à travers les affaires foncières. Le ministère de l’Habitat et ses directions, notamment celles de l’ADU et de l’Urbanisme ne sont plus que les antichambres de la fraude et de la falsification. Les rares fois que des citoyens obtiennent « normalement » un terrain en bonne et due forme, après un long chemin de croix, c’est juste pour faire diversion et masquer les pires formes de vol organisé de l’espace national urbain. La mascarade continue. De simples bouts de papier sont vendus de cinquante à deux cent mille ouguiyas. Ce sur quoi deux s’entendent. Des documents qui serviraient, aux risques et périls des acquéreurs, à légaliser l’acquisition. C’est juste une question de chance, vous expliquent les samsaras en herbe qui gravitent autour des grands. Les litiges sont donc légion. Les commissariats de police, les préfectures et les enceintes des tribunaux départementaux ne désemplissent pas. Monsieur Soueïlim est un cinquantenaire, père de six enfants dont quatre petites filles. Il a eu la chance – ou la malchance – d’avoir obtenu, au tout début des opérations, un terrain excellemment situé, sur une rue de trente mètres. Un terrain que des gens comme lui ne détiennent habituellement pas et ne devraient jamais détenir, selon l’impertinente logique des mafioso de la terre. Le terrain d’Ould Soueilim devrait plutôt servir à construire une imposante épicerie, un gigantesque four ou une concurrentielle station-service. Les deux vieilles baraques qu’il y a construites, pour abriter sa pauvre famille, sont un véritable gâchis. C’est pourquoi vient-on, régilièrement, lui proposer de l’acheter ou de le lui échanger, contre un terrain plus reclus. Devant à son obstination à le garder, Ould Soueïlim s’en est vu tout bonnement dépossédé, sous prétexte que ses papiers étaient faux. Et, sans autre forme de procès, le revoilà sans domicile, errant dans la rue avec sa nombreuse famille. Non loin de lui, à Bouhdida-Gazra, en face de la station El Fadl, voici Dija mint Mohamed. Jusque-là, tout marchait pour elle. Les fameuses « moudakhalatt » devaient être en sa faveur, lui aurait dit un des agents de l’ADU. Mais c’était sans compter avec la cupidité de son voisin Ahmed Vall, puissant commerçant qui voulait encore plus d’espace, pour faire davantage marcher ses affaires. Comme attendu, Dija a été envoyée à Tarhil et le puissant Ahmed Vall, qu’elle accuse d’avoir corrompu les responsables de l’agence en fonction à Bouhdida, légitimé sur un vaste domaine. Vous avez dit République Islamique ? A moins qu’islam ne soit plus synonyme de justice – et il se trouvera bien, en effet, quelque ouléma, éventuellement soutenu par la matraque de quelque terroriste, heu, pardon, agent de police, pour vous en convaincre – on s’étonne, on s’étonne, au pays des hommes bleus…

Sneiba