Intégration du vaccin Rotarix : vers une réduction sensible de la mortalité infantile

18 December, 2014 - 01:13

Assises avec leurs bébés sur les bras, devant un centre de santé de la capitale, Meïmouna, Aminata, Fatima et Raki n’ont, en ce jour de samedi 6 Décembre, qu’un seul sujet sur les lèvres : l’intégration de la lutte contre le rotavirus dans le Programme Elargi de Vaccination (PEV) de routine, au même titre que la diphtérie, la coqueluche, le tétanos, l’hémophilus du type B et l’hépatite B. « Contre quel type de diarrhées le nouveau vaccin va-t-il protéger nos enfants et combien faudra-t-il de temps entre les doses ? », se demande Meïmouna, visiblement contente de l’antigène. « La durée d’intervalle entre les deux doses est de quatre semaines », répond Aminata, sans toutefois apporter de précisions sur le type de diarrhées (liquides ou solides) couvertes par le vaccin.

Au-delà de leur compréhension, variable, du planning d’intégration, ces mères sont unanimement convaincues d’une chose : les diarrhées sont fréquentes et tuent massivement les enfants mauritaniens, surtout dans les premières semaines de leur vie. Selon le ministre de la Santé, monsieur Ahmedou ould Hademine ould Jelvoune, l’introduction du vaccin entend, de fait, réduire la mortalité infantile et contribuer, ainsi, à atteindre les objectifs du Millénaire. « La Mauritanie », affirme-t-il, « a engagé une dynamique visant à renforcer son programme élargi de vaccination, avec l'introduction de ce nouveau vaccin contre les diarrhées qui constituent une des premières causes de mortalité, avant le paludisme et la malnutrition ». Et d’ajouter : « grâce aux efforts consentis par le PEV, aucune épidémie des maladies ciblées par la vaccination n'a été enregistrée depuis quelques années et la couverture vaccinale est passée de 64 %, en 2010, à 80 %, en 2013 ».

Pour sa part, le représentant de l’OMS à Nouakchott, le docteur Baptiste Jean-Pierre, souligne que l’intégration du nouveau vaccin doit être perçu comme un moyen de « sauver des vies, alléger la pression sur les systèmes de santé et éviter de grandes souffrances à de nombreuses personnes […] La vaccination reste le moyen de prévention le plus sûr et le moins cher, pour éviter des maladies mortelles ou handicapantes ». Concernant le Rotarix, le docteur Baptiste estime, lui aussi, qu’il « concourt à l’atteinte des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD), plus spécialement les OMD 4 et 5 qui visent, respectivement, la réduction de la mortalité infanto-juvénile et la réduction de la mortalité maternelle ». Et de noter que les indicateurs relatifs à la mortalité infantile et maternelle restent, en Mauritanie, « encore préoccupants, malgré les progrès et les efforts entrepris, notamment par l’initiative du président de la République pour accélérer l’atteinte des OMD ».

 

Couverures vaccinales élevées

 

Quant au docteur M’Bareck ould Houmeïd, responsable du PEV au ministère de la Santé, il nous apprend que le vaccin sera désormais disponible, à l’échelle nationale, à partir du 6 décembre 2014, dans tous les sites de vaccination. «Le Rotarix protège à 96% », précise-t-il, « C’est un complément très efficace aux mesures d’hygiène comme le lavage des mains avec du savon, l’utilisation des SRO-sel, et des autres produits utilisés oralement contre les déshydratations ». Parlant de l’incidence de la maladie nouvellement intégrée dans le PEV, le docteur M’Barek souligne que le gouvernement, appuyé par ses partenaires – OMS, UNICEF et Alliance globale pour les vaccins et l’immunisation (GAVI) – a décidé d’introduire l’antirotavirus, dans la vaccination de routine, compte tenu de l’évidence du poids de la maladie  et l’efficacité, démontrée, du Rotarix à réduire, de façon significative, l’incidence des maladies invasives liées à ce virus ».

Évoquant les raisons qui ont conduit au choix du Rotarix, le coordinateur en a révélé les suivantes : c’est un vaccin capable de réduire de 85 à 98 % les infections dues au rotavirus ; il permet d’atteindre rapidement des couvertures vaccinales élevées (car le vaccin suivra le calendrier actuel pour le pentavalent) ; il simplifiera les opérations programmatiques et managériales, notamment dans l’enregistrement des données, réduisant ainsi les coûts opérationnels ; il détient la meilleure adaptabilité aux conditions environnementales et de performance du PEV mauritanien ; il est gratuit et disponible dans toutes les structures de vaccination du pays ; oral, il peut être administré en même temps que le pentavalent (DTC-HepBHib) et ne nécessite pas une visite supplémentaire de  l’enfant au centre de vaccination. Le Sénégal, le Maroc et le Mali, ajoute le docteur M’Barek, ont déjà introduit, avec un succès probant, ledit vaccin contre les diarrhées responsables du décès de onze millions d’enfants, chaque année, dans le Monde.

Le responsable de la vaccination et de la nutrition à l’OMS, le docteur Nacerdine ould Zeïdoune renchérit : « Oui, le rotavirus est la principale cause de diarrhées infantiles, graves et mortelles, dans le monde. L’OMS recommande que les vaccins antirotavirus soient intégrés dans tous les programmes nationaux de vaccination et considérés comme prioritaires, en particulier dans les pays ayant des taux élevés de mortalité par GastroEntérite à RotaVirus (GERV), comme en Asie du Sud et du Sud-est, ainsi qu’en Afrique subsaharienne. En Mauritanie, ces infections constituent un problème majeur de santé publique, c’est une des premières causes de mortalité ».

Il insiste : « La réduction de la mortalité infantile due à la diarrhée nécessite la prévention de l’apparition de la maladie chez l’enfant, grâce à une couverture universelle de la vaccination. […] Utilisé dans le Monde entier depuis 2006, Rotarix a fait preuve d'un haut degré de sûreté mais, s’il est très efficace, pour la prévention de diarrhées et de vomissements générés par le rotavirus (principale cause d’hospitalisation pour diarrhées), il ne prévient pas les diarrhées ou les vomissements dus à d'autres causes […] Les infection à rotavirus sont très contagieuses. Il est donc recommandé que tous les bébés reçoivent le vaccin, y compris des bébés ceux qui ont déjà souffert d'une infection par rotavirus. […] La quasi-totalité des enfants sont exposés au rotavirus, avant l’âge de 3-5 ans, partout dans le Monde, et les enfants des pays à faible revenu contractent l’infection très tôt, banalement au cours de leur première année de vie. J’appelle donc particulièrement les parents mauritaniens à veiller à la vaccination complète de leur enfant avant son premier anniversaire, en tant que son premier passeport pour la vie. Il est de notre devoir à tous de s’assurer qu’aucun enfant n’est laissé pour compte. Tous les responsables, à tous les niveaux, doivent intensifier les efforts pour s’assurer que tous les enfants soient complètement vaccinés. Ce n’est qu’ensemble que nous parviendrons à mieux lutter contre les maladies évitables par la vaccination ».

« Le vaccin antirotavirus protège le nourrisson contre une cause importante de la diarrhée, mais pas contre toutes », répète-t-il, enfin, avec insistance. « Un enfant qui a été vacciné peut donc tout de même contracter une diarrhée due à d’autres agents. […] La prévention des maladies diarrhéiques infantiles inclut également une amélioration de l’allaitement exclusif au sein, pendant six mois, une supplémentation en vitamine A, l’approvisionnement en eau salubre et la promotion de pratiques d’hygiène essentielles (lavage des mains au savon, notamment) ». Voilà Meïmouna, Aminata, Fatima et Raki mieux informées.

K.T